Vie montréalaise
Une croix pour le premier Noël à Montréal
Qui sait que la croix qui illumine le mont Royal est intimement liée au premier Noël à Montréal ? Célébré en 1642 à l’intérieur de la palissade du fort de Ville-Marie, ce Noël a été souligné sur la pointe à Callière, site qu’occupe aujourd’hui la Cité d’archéologie et d’histoire de Montréal, dans le Vieux-Montréal.
Une nuit de Noël pour le moins mouvementée puisque le site, occupé par Paul de Chomedey de Maisonneuve, est menacé par des inondations qui risquent d’engloutir les habitations. À vrai dire, l’atmosphère est plutôt lugubre cette nuit-là et tous les habitants de Ville-Marie prient avec ferveur pour que le fort ne disparaisse sous les eaux menaçantes.
À cette occasion, le fondateur de Montréal plante une croix aux abords de la Petite rivière, faisant le serment d’en porter une autre, plus grande, sur le mont Royal si jamais le Seigneur épargne les habitations. Son souhait est exaucé et une première croix est plantée sur le mont Royal en 1643.
Bien entendu, celle qui surplombe le mont Royal aujourd’hui est plus récente... Installée le 24 décembre 1924, la croix, d’une hauteur de 31,4 mètres, a été érigée par la Société Saint-Jean-Baptiste, d’après une idée du sulpicien Pierre Dupaigne et les plans des architectes Gascon et Parent. Le système d’ampoules incandescentes a de son côté été remplacé en 1992 par un système de fibres optiques... modernisme oblige !
Noël en Nouvelle-France
Mais revenons en Nouvelle-France, où dès le début de la colonie, on fête Noël selon la tradition française. Les Ursulines confectionnent une crèche ornée de sapins qui représente la Sainte Famille, les anges et les pasteurs. Ce spectacle étonne vivement les Hurons qui aperçoivent pour la première fois la scène.
Si les rudes conditions hivernales et la précarité des premiers postes ne permettent pas aux gens de s’adonner à de fastueuses festivités, le fort sentiment religieux et l’élan missionnaire qui règne à cette époque donnent à l’événement une grande importance. D'ailleurs, les missionnaires organisent un rituel de la Nativité souvent soutenu par des manifestations musicales et une mise en scène qui impressionnent également les Amérindiens.
Une fois passée la période des pionniers, la fête de Noël prend davantage d’ampleur, notamment après la Grande Paix de Montréal, en 1701, qui coïncide avec une période de relative prospérité.
La fête de Noël s’inscrit dans un calendrier chargé et la messe de minuit en est le moment fort. La cérémonie commence sur le coup de minuit, avec une salve de fusil bien nourrie, après quoi, c’est la messe à laquelle assistent les paroissiens où l’on entonne des cantiques et certains chants comme Ça bergers ou Les anges dans nos campagnes. Puis, au terme de la veillée qui se termine à l’église, et après avoir arpenté les chemins enneigés, un frugal réveillon est organisé où se mêlent les chants et la danse.
À cette époque, les étrennes sont plutôt échangées au Jour de l’an et non à Noël. La grande métamorphose de Noël va survenir aux environs de 1850 en Europe et en Amérique, par la transformation d’une fête religieuse en une fête pour la famille.
Saint Nicolas... l’ancêtre du père Noël
Mais s’il est une tradition qui perdure, c’est bien celle de personnages légendaires associées à Noël dont Saint Nicolas, le célèbre donateur qui est véritablement à l’origine du mythique Père Noël.
En fait, c’est même plutôt la déesse Strenia qui, durant les fêtes du solstice de l’Antiquité à Rome, offrait les étrennes, c’est-à-dire de petits objets en céramique composant des figurines sculptées ou encore des jouets pour enfants. Saint Nicolas, évêque en Turquie, vers le début du 4e siècle, s’est pour ainsi dire superposé à cette tradition païenne pour devenir le saint prodigue des Chrétiens. La chronique mentionne que Saint Nicolas, héritier d’une fortune, serait venu en aide à plusieurs personnes dans le besoin et se serait ainsi mérité le statut de protecteur des enfants.
L’historien Yvan Fortier, de Parcs Canada, signale pour sa part que la figure de Saint Nicolas s’est répandue en Europe à compter du 12e siècle. On le retrouve par la suite en Nouvelle-France et ce, jusqu’au milieu du 20e siècle où il continue d’être la personnification du généreux donateur... jusqu’à ce qu’un certain père Noël ne lui fasse un peu d’ombrage.
Tel un amalgame de différentes traditions, notamment le Gargan des Celtes et le Thor scandinave, le père Noël devient aux États-Unis – et plus tard dans le monde – l’incarnation emblématique de Noël qui a toujours cours, aujourd’hui.